C'est en italien que j'ai découverts et aimés les poèmes deWisława Szymborska, fort peu traduite en français alors que l'on trouve en Italie un volume bilingue (polonais-italien) contenant tout son œuvre poétique de 1945 à 2009, paru chez Adelphi sous le titre La gioia di scrivere (La joie d'écrire). De façon plutôt inattendue, même si Szymborska a reçu le Prix Nobel de littérature en 1996, l'ouvrage a connu un très grand succès et en est à sa neuvième réimpression en trois ans. Je cite ici l'un de ses poèmes que j'aime le plus, dans la traduction italienne de Pietro Marchesani, et en proposant à la suite ma propre traduction en français de cette traduction...
Morire - questo a un gatto non si fa.
Perché cosa può fare il gatto
in un appartamento vuoto ?
Arrampicarsi sulle pareti.
Strofinarsi tra i mobili.
Qui niente sembra cambiato,
eppure tutto è mutato.
Niente sembra spostato,
eppure tutto è fuori posto.
E la sera la lampada non brilla più.
Si sentono passi sulle scale,
ma non sono quelli.
Anche la mano che mette il pesce nel piattino
non è quella di prima.
Qualcosa qui non comincia
alla solita ora.
Qualcosa qui non accade
come dovrebbe.
Qui c'era qualcuno, c'era,
poi d'un tratto è scomparso
e si ostina a non esserci.
In ogni armadio si è guardato.
Sui ripiani si è corso.
Sotto il tappeto si è controllato.
Si è perfino infranto il divieto
di sparpagliare le carte.
Che altro si può fare.
Aspettare e dormire.
Che lui provi solo a tornare,
che si faccia vedere.
Imparerà allora
che con un gatto così non si fa.
Gli si andrà incontro
come se proprio non se ne avesse voglia,
pian pianino,
su zampe molto offese.
E all'inizio niente salti né squittii.
Wisława Szymborska La gioia di scrivereAdelphi Edizioni, 2009 (Traduzione : Pietro Marchesani)
Mourir - on ne doit pas faire ça à un chat.
Car que peut faire le chat
dans un appartement vide ?
Grimper aux murs.
Se frotter aux meubles.
Ici, on dirait que rien n'a changé,
et pourtant tout est différent.
On dirait que rien n'a bougé,
et pourtant plus rien n'est à sa place.
Et le soir la lampe n'est plus allumée.
On entend des pas dans les escaliers,
mais ce ne sont plus les mêmes.
Et la main qui dépose le poisson dans l'écuelle
N'est plus celle d'avant.
Ici, plus rien ne commence
à l'heure habituelle.
Plus rien ne se passe
comme prévu.
Ici, il y avait quelqu'un, bien présent,
et tout à coup, il a disparu
et il s'obstine dans son absence.
On a regardé dans toutes les armoires.
On a couru sur toutes les étagères.
On a vérifié sous le tapis.
On a même transgressé l'ordre
de ne pas éparpiller les papiers.
Que peut-on faire d'autre ?
Attendre et dormir.
Qu'il s'avise seulement de revenir,
qu'il se montre.
Il apprendra alors
qu'on ne doit pas se comporter ainsi avec un chat.
On ira à sa rencontre
comme si l'on n'en avait aucune envie,
tout doucement,
sur des pattes très vexées.
Et au début, il n'y aura ni bonds ni petits miaulements.
(Traduction personnelle)
Images : en haut, Raffaello Pacini (Site Flickr)
en bas, Andrea Fini (Site Flickr)